La recherche d’une distanciation avec la sonorité traditionnelle d’un instrument m’a naturellement porté vers les racines de l’instrument à vent : l’air est un tuyau de résonance. L’électronique, dans ma pièce, joue le rôle d’une seconde caisse de résonance dans laquelle l’interprète se situe virtuellement. La clarinette renonce au bec pour ouvrir ainsi la voie à une interaction forte entre l’appareil vocal de l’interprète et la résonance du corps de l’instrument. L’équilibre entre les centres de production sonore classique se déplace. La redéfinition des équilibres classiques dans l’instrument et les mouvements de déterritorialisation (Deleuze, Guattari) portent alors l’instrument vers un nouvel équilibre (la voix de l’instrumentiste se substitue au bec de la clarinette). J’aime bien lier cela au concept de Corps-sans-Organes qui fait référence à Deleuze, Guattari ou Artaud. Je vois l’instrument comme un « Corps-sans-Organes » qui trouve une nouvelle organisation. Les sons à l’intérieur de la pièce sont en relation entre eux, on pourrait utiliser la métaphore d’une galaxie. Le centre (d’attraction) est constitué de sons d’air consonantiques et, à moyenne distance du centre, se trouve un son produit par la voix qui ressemble au son du duduk, un instrument traditionnel arménien, et qui est à la périphérie du son habituel de la clarinette.
Emanuele Palumbo.
Note de programme du Concert Cursus 1 du 2 avril 2015 au Centre Pompidou.