Le temps habité
Journées de rencontres sur le rythme et le temps
Nous parlons du rythme suivant une approche heuristique et pratique, rigoureuse mais sans exigence théorique excessive qui pourrait paralyser les échanges. Le sujet est vaste et déjà tellement théorisé.
Dans le modeste cadre de ces rencontres nous essaierons de provoquer le croisement de personnalités qui par leur pratique instrumentale, leur écriture, leurs créations témoignent d’un rapport privilégié à l’aspect temporel de leur art.
Temporel ? Oui mais le rythme suppose au moins une forme de présence inscrite dans une durée : ce qui la distingue de la temporalité scientifique.
Le rythme conjugue aussi des dimensions spatiales sous forme de mouvement, épousant ou combattant la gravité. Le rythme invoque des renvois, des attentes comblées ou déçues, des jeux de mémoire, la tension entre un passé et un « à venir » ; éventuellement des développements narratifs ou inscrits dans la trame de processus réguliers ou chaotiques. Le rythme implique le jeu du même et du différent. Le rythme piège le temps en boucles, en prolations, en accélération / ralentissement, propose des formes holographiques se réfléchissant en cascades fractales dont les détails retracent l’ensemble à différentes échelles… Le rythme éveille des forces qui créent ou défont les synergies du groupe.
Des controverses esthétiques seront sans doute soulevées : « les instances rythmiques peuvent-elles se déployer en dehors d’une pulsation perceptible et partagée par le récepteur (le public ?) La pulsation régulière est-elle un facteur d’exclusion de l’esthétique contemporaine ? Les logiciels musicaux – à ce stade de développement – semblent-ils moins performants sur ces paramètres (que par exemple sur l’analyse des hauteurs ou le traitement de signal…) Peut-on se satisfaire de la succession de temps forts / faibles de « n » longueurs sur une ligne temporelle ? Quelles seraient les avancées en termes de quantification d’événements « rythmiques » musicaux ou non pré-écrits musicalement (les mouvements de danseurs, phénomènes physiques, de chants, cris d’animaux par exemple ?)
Nous aimerions aussi inviter des musiciens issus de pratiques extra-européennes (Inde, Perse, par ex.) ou hors du champ de la musique contemporaine occidentale (jazz, DJ). L’occasion se présente de proposer un focus sur les instruments de percussions non pas qu’ils seraient plus « rythmiques » mais parce que leur champ d’action est à priori porteur de développements et de compétences en ces domaines.
Thierry De Mey