Michel Imberty’s considerations about time as a proto-narrative envelope gives us an incre- dibly effective perspective to interpret the dif cult relationship between creativity, narra- tion and musical structure. The framework of the temporal experience precedes narrative itself, it is what can be called a “proto-narrative form” and organises the coherence and development of the art of narration, and perhaps of the musical form. In this perspective, music seems to be a representation of the origin of all language forms , i.e. of every way of organizing time. In the light of these re ections, we have interpreted a musical experience with a gifted, autistic and visually impaired young man (G) engaged in a piano improvisa- tion inspired by a story: The story of the snow. In this experimentation, G’s task was to create a soundtrack for The story of the snow while it was being told by a narrator; the story was a description of a blizzard and of the vicissitudes of a wolf and a bird. The second part of the story evoked the image of a small house in the woods from which the sound of a piano came: it belonged to a jazz pianist. All the elements utilised in the story were familiar descriptions for G, as some of them reminded him of his favourite cartoons, and of some popular children’s fairy tales such as Peter and the Wolf. An expert percussionist had the task of reinforcing and enhancing G’s improvisational intentions during the whole experience. In the rst part of the story, G’s musical behaviour was childish and stereotypical, the gestural and technical capacities he utilised were simpler than we had expected, and his musical thoughts were completely unstructured. The percussionist’s role seemed to be absolutely irrelevant, and G was improvising unstructured musical fragments, showing typical autistic traits as inhibitions, regressions and lack of creativity. Conversely, in the part of the story evoking the small house with a jazz pianist inside, his musical performance changed completely. G seemed to be extremely attentive and focused, he suddenly lost his previous inhibitions and displayed an evident rhythmical pro le. His gestures became very precise and coherent with his musical capabilities, and G established an interesting musical dialogue with the percussionist. A psychoanalytic interpretation of the whole experience was presented at the 13th European Congress of Psychology in Stockholm in 2013. According to this interpretation, the identi cation with the jazz pianist allowed him to recuperate his own musical back- ground, and to activate his sophisticated musical skills, leaving behind the stereotypical behaviour employed during the rst part of the story. The analysis of the numerous temporal levels of the narration, of the improvisation fea- tutes, and of the rhythmic dimension in the light of Imberty’s thinking allows us to interpret G’s behaviour from a strictly musical point of view, and offers a different perspective of musical creativity.
Michel Imberty : la psychologie de la musique au-delà des sciences cognitives - 2e jour
Si les travaux de Michel Imberty dans le domaine de la psychologie cognitive de la musique sont connus (Entendre la musique, 1979, Les écritures du temps, 1981), ils ne s’inscrivent dans les courants comportementalistes et structuralistes de l’époque que d’une manière particulière et partielle. Dans ces ouvrages comme dans les nombreux articles qui suivront, progressivement se dégagent deux thèmes interdisciplinaires et surtout une position épistémologique plus proche de celle de l’anthropologie ou de l’ethnomusicologie, position qu’on pourrait qualifier de phénoménologique. Ces deux thèmes sont d’une part la temporalité et /ou le temps musical – le plus ancien dans sa réflexion - , la nature et l’origine de la musicalité humaine d’autre part, concept central développé parallèlement dans l’ouvrage de 2005, La musique creuse le temps. Or c’est aussi dans cet ouvrage que la position phénoménologique du chercheur est affirmée, car la réflexion sur le temps musical pose non seulement des problèmes de cognition au sens classique, mais des problèmes de sens et de signification qui étaient déjà la matière des deux premiers ouvrages. Le sens pose la question de l’intentionnalité, et on ne peut travailler sur la musique – comme sur toute œuvre humaine – sans s’interroger à la fois sur les conduites (du compositeur, de l’exécutant-interprète, de l’auditeur), et sur le sens que ces conduites ont pour ceux qui en sont les actants intentionnels. Plus encore, on ne peut le faire sans s’interroger sur le sens que tout cela prend pour le chercheur lui-même, le sens qu’il donne à sa recherche par rapport à ce que les sujets qu’il interroge en perçoivent eux-mêmes.
En interrogeant la musique à travers un large champ de recherche, qui va des théories psychanalytiques au bouclage du temps dans un parcours « proto-narratif » tel que la biologie contemporaine en relève les traces dans le fonctionnement cérébral, Michel Imberty a ouvert un espace considérable à l'interprétation des faits musicaux, et ses écrits interrogent aussi bien le musicologue et l'analyste de la musique que le psychologue ou le philosophe qui s'intéresse à la manière dont l'être humain donne sens à la temporalité. Ce colloque, intitulé « Michel Imberty, la psychologie de la musique au delà des sciences cognitives » se propose d’accueillir les contributions de chercheurs qui ont été à un moment ou à un autre de leur parcours, marqués par cette pensée qui fait entendre le fait musical sous un angle radicalement renouvelé.