Je ne sais pourquoi ce texte m'a plu qui parle d'un lieu que des hommes ont abandonné, et de l'un d'entre eux qui dès lors s'y retrouve seul et entouré d'une nature de plus en plus présente on ne sait tout à fait si bienveillante ou inquiétante. Peut-être parce que cet abandon inexpliqué et ce vent dépeuplé – un vento spopolato – suggèrent une solitude et un oubli – un effacement – qui me sont chers, un vide où le temps ne tombe plus qui serait pour moi à la fois une angoisse et une quête. Il m'a semblé, dès lors que j'avais choisi d'écrire pour des instruments anciens dont l'organologie, je l'ai compris à grand-peine, est intrinsèquement lié à la musique qu'elle produit – ou inversement – qu'il me fallait être dans l'évitement. Éviter précisément d'abonder dans le sens des modes au tempérament pythagoricien qui m'eurent enfermé dans une logique de composition qui ne m'appartient en rien, éviter de me heurter à un ancien français qui n'aurait pas trouvé de sens avec les sons que j'entends. Il y a dans ce projet, j'en ai bien peur, une aporie inexorable. J'ai donc choisi une langue qui m'est proche et pas tout à fait mienne et j'ai travaillé l'instrumentarium médiéval en tentant de l'extraire de son époque et de son lieu voire de l'orienter vers un orient improbable où semblait m'appeler, à certains moments, le texte de Giorgio Caproni.
un matin, je décrocherai la lanterne du mur et je dirai adieu au vide.
Jérôme Combier.